L'inauguration du monument aux morts de Triel, le 5 février 1888

De Le Wiki de la Grande Guerre

Souscription pour élever un monument aux morts à Triel.

Photo de la cérémonie du 11 novembre 1929.jpg

cérémonie du 11 novembre 1929 au cimetière de Triel Triel

Sous la présidence de Charles Vallin, les jeunes gens de Triel ont ouvert une souscription pour élever un monument commémoratif aux enfants de la commune morts sous les drapeaux, comprenant toutes les classes depuis 1870. Le conseil municipal, pour s’associer à la pensée généreuse des souscripteurs a affecté à cet objet une somme de cinquante francs.

Inauguration du monument aux morts de Triel, le 5 février 1888

Les localités avoisinantes se sont empressées de répondre à l’invitation qui leur avait adressée la municipalité de Triel, et dès le matin, on a pu voir accourir de toutes parts, compagnies de pompiers, sociétés de gymnastique et bataillons scolaires en grand uniforme, clairons sonnants et bannières déployées.
Empressement certes très méritoire, car le dégel avait transformé tous les chemins en véritables marécages.
Sur la place, devant la mairie, les Sociétés ont été reçues par des membres du conseil municipal de Triel, notamment par MM. Charles Tréheux, Ibert, Pion et le journaliste Hector Pessard, ainsi que MM. Barbe et Hubbard, députés, Jozon, maire de Meulan, Lenoir, maire des Mureaux et de Colomb, le fils du général, un des héros du Tonkin.

L’inauguration précédée d’un service religieux a eu lieu avec le concours des fanfares, des sociétés de tir et de gymnastique ainsi que de diverses compagnies de sapeurs-pompiers des environs dont les noms suivent :
Compagnies de sapeurs-pompiers de :
Triel, Mézy, Meulan, Ecquevilly, Conflans, Chanteloup, Carrières, Andrésy, Les Mureaux, Vernouillet, Verneuil, Poissy, Pontoise, Menucourt, Vaux, Epône, Maule, Mézière. Sociétés de tir de :
Triel, Andrésy, Pontoise, Menucourt, Vaux.
Sociétés de gymnastique de :
Pontoise et les bataillons scolaires de Conflans et de Chanteloup.

Le programme de la cérémonie a été le suivant :
A midi et demi, réception de la municipalité par le conseil, la compagnie de pompiers et la société de tir.
A 1 heure, vin d’honneur offert aux Sociétés, place de la mairie.
A 2 heures, formation des sociétés, quai de la Seine.
A 3 heures 10, réception des députés, annoncée par deux salves d’artillerie.
A 3 heures ¼, départ pour le cimetière.
Une foule considérable assistait à cette cérémonie patriotique.

C’est à l’entrée du cimetière que se dresse le monument : une pyramide de granit élevée de 4 mètres, sur les faces desquelles sont gravés les noms suivants :
Acoulon, Cottard, Corroyer, Dupuis, Desprez, Gradelet, Laurent, Lesage, Morizet, Moreau, Richard, François, Michel, Vallin, Cottard, Legrand, Lutger, Durand, Laurent, Rousselin, Berton, Mayet, Gros-Henry, Léger, Dubranle, Ciza, Damême, Pigeon.

Plusieurs discours ont été prononcés.
Le président du comité, M. Ch. Vallin, a prononcé le premier discours, pour remettre le monument à la municipalité de Triel. Au nom de cette municipalité, M. Ibert a répondu.
Puis, M. Hector Pessard a répondu en ces termes :

Mes chers concitoyens,
En érigeant à la mémoire des enfants de Triel le monument que nous inaugurons aujourd’hui, nos amis les membres du comité n’ont pas voulu seulement rendre un fraternel hommage aux victimes modestes de la vie militaire.
Une pensée plus haute les a guidés. Ils ont voulu que ces pierres immobiles rappellent sans cesse aux jeunes générations les grands devoirs qu’elles auront à remplir vis-à-vis de la patrie et leur apprennent, en même temps, que sous la République la France ne marchande pas les témoignages de sa reconnaissance à ses plus humbles serviteurs.
Oui, il est bon, il est salutaire que notre démocratie ait aussi du marbre pour honorer les héros inconnus tombés obscurément dans les grandes batailles ou ceux qui succombent sous les fatigues et les privations ; oui, il est juste que notre démocratie trouve aussi du bronze pour honorer ces soldats que la loi vient prendre à leur foyer pour les jeter à la gueule des canons et qui, modestement, sans espoir de récompense, accomplissant le devoir pour le devoir, font à la patrie française le sacrifice de leur existence.
Et par la patrie, mes chers concitoyens, il ne faut pas seulement entendre cette terre féconde et généreuse dont l’étranger, hélas ! détient encore une partie. Le mot « Patrie » dans la bouche des fils de 1789, a une signification plus large et plus élevée. Il résume l’effort de tous les Français de tous les âges et de toutes les époques, pour atteindre l’idéal de justice auquel peuvent parvenir les sociétés modernes.
Quiconque a soulagé une misère, tendu une main amie à un être souffrant, élargi le champ des connaissances humaines, libéré dans une mesure, si petite qu’elle soit, l’homme des fatalités naturelles ou des servitudes sociales, celui-là aussi est un patriote dans la plus belle acception du mot, car son cœur bat à l’unisson du cœur de cette noble France, terre de toutes les générosités, de tous les sacrifices, de toutes les bontés, de toutes les grandeurs.
Mes chers concitoyens, autour de ces pierres qui garderont éternellement le souvenir de nos chers morts, élevons nos âmes vers l’âme de la patrie. Regardons avec une implacable fermeté vers l’Est, où veille, lui aussi, un ennemi implacable. Apprenons en même temps, devant le monument le monument funéraire élevé à la mémoire des victimes du devoir, à connaître notre devoir et à le remplir tout entier quand l’heure sera venue. Aimons-nous comme les fils d’une même mère, unissons-nous dans une même pensée de dévouement et de fraternité, comme nous nous unissons dans ce cri, expression de toutes nos aspirations : « Vive la République ! vive la France !.

A 5 heures, il a été offert une médaille commémorative aux Sociétés qui ont pris part à la cérémonie.

Le soir, un grand banquet réunissant une centaine de convives a terminé cette fête commémorative. Il a été présidé par M. Ch Vallin, ayant à sa droite M. Barbe et à sa gauche M. Hubbard.
Au dessert, M. Vallin a remercié en quelques mots les députés et leur a porté un toast. M. de Colomb, au nom de l'armée, s'est associé à ce toast. Il a bu à l'armée, à M. Vallin, organisateur de la fête, à la France et au Drapeau.

Au 20e siècle, les noms des soldats morts en 1914-1918 et en 1939-1945, ainsi que ceux des victimes civiles de guerre ont été inscrits sur les autres face du monument.

Sources

  1. Seine et Oise illustré : 5 février 1888.
  2. Le Petit Parisien : 08 février 1888.
  3. Registre des délibérations du conseil municipal : 1D 17 (1876-1888)