Différences entre versions de « Les réfugiés belges en Seine-et-Oise »
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+ | *- [[Chronique de novembre 1914: La prise en charge des réfugiés]] | ||
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Version actuelle datée du 23 juin 2015 à 15:55
Avec le début de la Première Guerre mondiale en Europe, on assiste à un déplacement massif de populations vers leurs pays voisins. La France a ainsi accueilli dès 1914, des réfugiés étrangers sur son territoire, dont la plupart étaient Belges. Le nombre de ces réfugiés reste difficile à établir bien qu’ « une statistique fa[sses] état de 325 000 réfugiés belges en France au moment de l’armistice » [1] avec une majorité principalement présente dans l’ancien département de la Seine. On en dénombre ainsi 12 650 en Seine-et-Oise en 1917.
Comment la France s’est-elle organisée pour accueillir les réfugiés étrangers (en particulier belges) sur son territoire (et notamment en Seine-et-Oise) ? Et quelles ont été les décisions prises à leur égard ?
L’arrivée des réfugiés étrangers en France
Un accueil chaleureux des Français…
Lorsque les réfugiés étrangers arrivent en France au tout début de la guerre, rien n’a été prévu pour les accueillir. Le gouvernement français doit alors rapidement trouver une solution pour leur porter assistance tout en s’employant à organiser l’effort de guerre. Ainsi, pendant toute la durée du conflit, l’État fait voter un grand nombre de lois visant à aider les réfugiés. La première de ce corpus législatif du 5 août 1914 qui donne aux autorités militaires « le droit de pourvoir, par voie de réquisitions, au logement, à la nourriture, au chauffage et, en cas de maladie, au traitement des individus et à la subsistance des individus qui, ayant été évacués comme bouches inutiles par le gouverneur d’une place force, auront déclaré se trouver sans moyens d’existence ». Cette loi est ensuite suivie de nombreux autres textes législatifs complexes conduisant à la création d’une « charte des réfugiés »'[2].
En parallèle, est créée une allocation versée aux réfugiés, et sont fondées plusieurs associations ayant pour but de venir en aide aux réfugiés. Cette aide est matérielle, parfois monétaire, mais surtout psychologique et humaine. En effet, les populations déportées ayant subi un grand traumatisme en devant quitter leurs pays, les associations veillent à les soutenir dans cette épreuve en organisant, par exemple, des fêtes ou en essayant de réunir les familles.
Pourtant, les quelques œuvres existantes, et les différentes mesures mises en place n’arrivent pas à dissiper le malaise des réfugiés, qui sont souvent logés dans des conditions difficiles.
… qui se transforme rapidement en méfiance
« Après une période de compassion, les réfugiés se heurtent à une certaine hostilité des populations »[3]. En effet, alors que la population française a accueilli à bras ouvert les populations réfugiées sur son territoire, les relations changent à partir de 1915 pour devenir plus hostiles.
Cette méfiance vis-à-vis des réfugiés peut s’expliquer de différentes manières (et peuvent être contradictoires). Ainsi, elle est dans un premier temps due à leur inactivité et leur non-participation à l’effort de guerre en arrivant sur le territoire français. Cette inactivité s’explique par le fait que les Belges étaient épuisés de leur voyage et qu’ils pensaient - comme la majorité des Français - que la guerre serait courte. Cette méfiance s’explique aussi par l’emploi qu’exercent les étrangers un peu plus tard et qui leur permettent parfois de gagner un plus gros salaire que les Français.
Ils sont rapidement surnommés « Boches du Nord » par les populations « qui leur reprochent de bouleverser l’équilibre des microsociétés que forment les quartiers des villes ou les petits villages et voient dans leur présence un risque de déstabilisation des communautés traditionnelles »[4]. Par ailleurs, les populations françaises les considèrent souvent comme des lâches ayant fui le conflit.
Le cas des réfugiés belges en Seine-et-Oise
Le recensement …
Très tôt pendant la guerre, le gouvernement a voulu recenser les réfugiés. Dans le cas des réfugiés belges, ce recensement s’est fait en étroite collaboration avec le gouvernement belge. Ce dernier s’intéressait dans un premier temps aux hommes de 18 à 25 ans résidant en France. Ainsi, en 1915, au travers des formulaires distribués aux réfugiés belges, le Ministre de l’Intérieur belge, Paul Berryer[5] , avait demandé qu’ « en vertu de l’arrêté-loi du 1er Mars 1915, tous les Belges âgés de 18 à 25 ans, sans aucune exception, se trouvant actuellement en France et n’étant pas encore sous les armes, [soient] tenus de s’inscrire pour faire partie du contingent de la levée de milice de 1915 pour la durée de la guerre »[6]. Le préfet de Seine-et-Oise, Auguste Autrand[7] , a ensuite chargé les mairies de s’occuper de ce recensement par l’intermédiaire d’un courrier officiel. Ce dernier a donc reçu des réponses (sous forme de lettres structurées ou de notes brèves sur papier libre) de chaque municipalité (bien que certaines d'entre-elles aient dû être relancées) .
Ces démarches sont répétées en 1916 pour les populations de 25 à 35 ans .
Les documents – produits ou reçus dans le cadre de ce recensement - montrent la volonté de faire participer les Belges à l’effort de guerre en les intégrant dans les forces armées de leur propre pays.
… parfois mal perçu et compris par les populations belges
Certains Belges ne comprenaient pas ce recensement et ne voulaient pas s’inscrire ou essayaient d’y échapper en refusant de signer les formulaires ou en déménageant sans laisser d’adresse par exemple . Le refus des populations belges de se soumettre au recensement a grandement compliqué la surveillance de la préfecture - surtout en période de conscription militaire. Cela a provoqué des recherches et des arrestations des Belges ne s’étant pas fait recenser comme la circulaire n° 43 du 17 Août 1915 du Ministre de l’Intérieur adressée aux Préfets, ou les procès-verbaux d’arrestation le montre.
Cela dit, certains de ces procès-verbaux montrent que certains Belges ne se sont pas faits recenser parce qu’ils ne savaient pas qu’il fallait le faire ou parce que, ne sachant lire, ils n’ont pas compris ce qu’on leur demandait.
Bilan
Si le recensement des Belges est plus documenté que celui d’autres populations ayant trouvé refuge en Seine-et-Oise pendant la Grande Guerre, c’est que ceux-ci étaient largement présents dans le département. Cela dit, les Belges, également très nombreux dans les départements de la Seine, du Calvados ou de la Seine-Inférieure, étaient sujet au même recensement qu’en Seine-et-Oise. Ce fort recensement des populations belges s’explique donc non seulement par leur forte présence sur le territoire français, mais aussi par la présence du gouvernement belge - ayant lui-même trouvé refuge à Sainte-Adresse, près du Havre en Normandie - avec qui le gouvernement français travaillait en étroite collaboration.
Sources et références
Sources
- - Archives départementales des Yvelines, Montigny-le-Bretonneux
- - Série R. AFFAIRES MILITAIRES, ORGANISMES DE TEMPS DE GUERRE
Sous série 1R. PRÉPARATION MILITAIRE ET RECRUTEMENT DE L’ARMÉE
- 1 R 460 - Recensement des Belges.
- 1 R 461 - Recensement général des réfugiés belges de sexe masculin, âgés de 25 à 35 ans, résidant actuellement dans le département.
Références bibliographiques
- - COCHET François, PORTE Rémy (dir.), Dictionnaire de la Grande Guerre. 1914-1918, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2008, 1120 pages
(consultable aux ADY, IN-8°8604)
- - NIVET Philippe, « Les réfugiés de guerre dans la société française (1914-1946) », Histoire, économie et société, n°2, 2004, p. 247-259
(consultable aux ADY, PER335/4)
Notes et références
- ↑ Cf. NIVET Philippe, « Les réfugiés de guerre dans la société française (1914-1946) », Histoire, économie et société, n°2, 2004, p. 248.
- ↑ Cette Charte parait le 17 février 1918 dans le Journal officiel. cf. Ibid., p. 249.
- ↑ Ibid., p.250
- ↑ Ibid., p.251
- ↑ BERRYER Paul (1868-1936) : homme politique belge ayant exercé les fonctions de ministre de l’Intérieur de 1910 à 1918.
- ↑ Archives départementales des Yvelines, 1 R 460
- ↑ AUTRAND Auguste (1858-1949) : haut fonctionnaire français ayant exercé les fonctions de préfet de Seine-et-Oise de 1906 à 1918.