Chronique de février 1915: La censure dans la presse
En raison de la loi sur la liberté de la presse de 1881, la France n’a aucun service de censure en 1914. Cependant, dès l’été 1914, le contrôle de la circulation de l’information est instauré par le Ministère de la Guerre. Les bureaux militaires locaux étaient chargés de la censure de la presse locale.
La double page ici présentée est extraite du Petit Mantais du 17 février 1915. Ce document est très représentatif des enjeux et du mode de fonctionnement de la censure durant la guerre.
Dans la première colonne, un emplacement blanc indique l’absence d’un article censuré. La présence d’une paire de ciseau indique sans ambigüité la raison : la censure du Bureau Militaire de Versailles est passée par là. Il s’agit donc ici de masquer une information sensible à la population. Cette censure est globalement acceptée de l’arrière, car elle semble alors dictée par les impératifs de la défense de la patrie.
Dans la colonne de droite, et au début de la page 3, le deuxième extrait intitulé « Lettre de soldat » montre à quel point la censure est souvent inséparable de son corolaire : le bourrage de crâne. En effet, le chapeau de l’article exalte l’esprit de sacrifice d’un sergent, qui semble ne pas se plaindre de son sort… ce que le lecteur ne peut vérifier, puisque l’encart blanc qui suit cet entête atteste du sort réservé à la missive dudit militaire. Cela traduit aussi le fossé que crée la censure entre un arrière désinformé et un front où les soldats n’adhèrent pas du tout à ses excès.
Pierre BURIGNAT