Chronique de mai 1915: Les prisonniers de guerre

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Cette carte postale intitulée « Prisonniers allemands de passage à Versailles » n’offre qu’un seul indice sur la provenance des soldats. En effet, on distingue à l’arrière-plan trois casques à pointe (« Pickelhaube ») caractéristiques des Allemands et qui devint rapidement leur surnom donné par les Français. Leur statut de prisonnier est en revanche aisé à discerner : les visages sont globalement fermés, les mines fatiguées, les bras ballants. Démunis, car désarmés, ces hommes n’ont plus leur raison d’être militaire : se battre. A l’abattement d’un enfermement dont la durée est inconnue se mêle une pointe de soulagement, celui d’en avoir fini, provisoirement au moins, avec la mort omniprésente.

La Grande Guerre a été marquée par la massification des prisonniers : 993 000 Allemands furent capturés par les Alliés dont 350 à 400 000 par les Français. Douze pour cent moururent en captivité. Malgré les interventions de la Croix rouge et du Vatican les belligérants gardent leurs prisonniers car il s’agit d’affaiblir l’armée ennemie durablement et de profiter d’une main d’œuvre docile. Les prisonniers, dont le sort a été précisé plus que fixé par plusieurs conventions internationales dont celle de Genève, présentent plusieurs intérêts : ils fournissent de précieux renseignements à travers des interrogatoires mais aussi grâce aux documents saisis en même temps qu’ils sont une main d’œuvre d’appoint non négligeable en ces temps d’insuffisance des effectifs. Ils furent retenus dans les multiples camps ouverts à cet effet en particulier dans le centre et le sud -ouest du pays ou placés chez des particuliers, parfois dès 1914 et bien après la signature de l’armistice. Les Alliés refusent de rendre les prisonniers tant que les traités ne sont pas signés et en janvier 1919, il y a encore en France presque 60000 prisonniers dont les 4/5ème sont employés dans l’agriculture. Ces prisonniers sont bien traités, soignés et nourris correctement, ce qui n’est rapidement plus le cas pour les prisonniers français dans une Allemagne qui souffre très vite des pénuries. Ils reçoivent le KKBrot (Kartoffellkriegsbrot) c'est-à-dire du pain de guerre fabriqué à base de pomme de terre. A partir de l’été 1917 les autorités françaises réduisent les rations en représailles.

Le traitement des prisonniers constitue des le début de la guerre un des éléments de la propagande à destination des opinions publiques. Il s’agit de montrer sa supériorité sur l’armée ennemie mais aussi que l’on est une nation civilisée. C’est pourquoi ces prisonniers font l’objet de la publication de cartes postales.

Isabelle ATTARD-AMAN et Pierre BURIGNAT

Pour aller plus loin :

- Dictionnaire de la Grande Guerre, sous la direction de J.Y.Le Naour, Larousse, 2008 - Encyclopédie de la Grande Guerre, sous la direction de S.Audouin-Rouzeau et J.J. Becker, Bayard 2013 Article Prisonniers, U. Hinz - Dictionnaire de la Grande Guerre, sous la direction de F. Cochet et R. Porte, collection Bouquins, R. Laffont, 2008, Article Prisonniers de guerre - La captivité de guerre au XXème siècle, sous la direction de A.M. Pathé et F. Théofilakis, A. Colin, 2012 - http://centenaire.org/fr/bien-traiter-les-prisonniers-le-devoir-d’une-nation-civilisee-par-uta-hinz-et-alexandre-lafon

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