Chronique d'avril 1917 : Humour de tranchée et propagande

De Le Wiki de la Grande Guerre
Révision datée du 10 avril 2017 à 16:11 par Sophie Blanchard (discussion | contributions) (publication chronique avril 1917)
(diff) ← Version précédente | Voir la version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)
Illustration "Le moral est bon", Le Petit Mantais, 18 avril 1917, p.3 - ADY PER1063/29

« 18 avril 17 - Le moral est bon. On a de la veine !... malgré nos blessures on a pas perdu la boule. »

Ce dessin s’inscrit dans le contexte des évènements du printemps 1917 : le 2 avril les Etats-Unis annoncent leur entrée en guerre et le 16 avril Nivelle lance son offensive au chemin des Dames, échec immédiat qui déclenche le début des mutineries.

Le message à faire passer est que les Français tiennent bon jusqu’à l’arrivée des Américains. L’image est un peu surprenante : avec les meules de foin, le paysage est presque bucolique à part un arbre coupé en 2 par un obus. On est semble-t-il dans le « bourrage de crâne » classique.

Le Petit Mantais, 18 avril 1917, p.3 - ADY PER1063/29

Les soldats sont pour l’un blessé à la tête, l’autre au pied, sans chaussure, sans casque. Il n’y a donc aucun souci de réalisme. Cependant ce document soulève la question de fond de l’épuisement psychologique des soldats et de leur santé mentale.

Les traumatismes sont liés aux explosions d’obus, mais aussi et surtout à la peur et aux visions d’horreur des agonisants touchés par les gaz, les corps mutilés, les cadavres décomposés sur les champs de bataille et les zones de tranchées maintes fois perdues et reprises.

La peur, la panique, la terreur, les angoisses sont accentuées par la précarité et la dureté des conditions de vie des soldats des premières lignes ainsi que par l’épuisement et le surmenage.

Les psychiatres considèrent que la guerre a créé de nouveaux modes d’apparition de pathologies sans pour autant en provoquer de nouvelles. Il n’y a donc pas de progrès thérapeutiques comme dans d’autres spécialités médicales. En revanche on prend conscience de l’importance d’une prise en charge rapide à la fois pour une plus grande efficacité et pour éviter la « contagion ». Elle se fait à proximité du front ce qui évite la rupture avec le milieu combattant et la crainte des simulateurs.

On peut mettre ce document en perspective avec un dessin satirique de l’Almanach du Petit Parisien de 1915 cité par M.Frachon dans son ouvrage Le Rire des tranchées, 1914-1918 : la guerre en caricatures publié aux éditions Balland en 2013. Il représente un officier allemand affirmant que ses « hommes ont un sang-froid admirable ; ils ne perdent jamais la tête » avec en arrière-plan un soldat décapité par l’explosion d’un obus.

Isabelle Attard-Aman


Pour aller plus loin :

  • Dictionnaire de la Grande Guerre, sous la direction de F. Cochet et Rémy Porte
  • Encyclopédie de la Grande Guerre, sous la direction de S. Audouin –Rouzeau et J.J. Becker, Bayard, 2013. Article « Névroses de guerre », S. Delaporte.


Téléchargez cet article au format PDF